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L’aéronautique française : un succès fragile?

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Le succès de toute la filière aéronautique française est le fruit d’un partenariat public-privé. Alors que l’état s’est désengagé du capital d’Airbus, ce succès va-t-il être remis en cause?


Un débat très instructif a été organisé mardi 27 mai à l’assemblée nationale : il avait pour thème la situation de l'industrie aéronautique française.

Un secteur pour clé pour l’économie française et où la France est l’un des rares pays à maitriser l’ensemble de la filière: avion, hélicoptères, moteurs...

«L’aéronautique est le succès de toute une filière et pas seulement d’Airbus, Dassault, Safran mais aussi des sous-traitants, des PME...Le succès repose sur un partenariat solide avec l’état» a déclaré Marwan Lahoud, directeur général délégué à la stratégie et à l’international du groupe Airbus et président du GIFAS.

Ce partenariat public-privé initié par des politiques visionnaires, qui pensaient à l'intérêt de l'Europe avant leur partis, a permis de lancer des grands programmes comme l’A380 et l’A350 dernièrement.

Le désengagement de l'Etat au capital d'Airbus fragilise le constructeur européen?

Pourtant comme l’a souligné Jean-Jacques Desvignes, responsable de la filière aéronautique et spatiale de la Fédération des travailleurs de la métallurgie CGT, ce succès pourrait être remis en cause par le désengagement de l’Etat dans le capital d’Airbus ou Safran : «le capital flottant représente désormais 74% du capital d’Airbus et 63% de celui de Safran. Les 5800 suppressions d’emplois au sein d’Airbus visent à satisfaire les actionnaire avec un retour sur investissement de 10% par an » a-t-il pointé.

Des réductions qui ne sont pas vraiment nécessaire selon lui alors que le carnet de commande d’Airbus et Boeing atteint 10000 avions et que 1200 avions sont livrés chaque année.

«Même si la filière a recruté 20000 emplois depuis 3 ans sur un total de 1770000 salariés employés par les entreprises du GIFAS, ces besoins ne tiennent pas compte de la pyramide des âges» assure-t-il.

Développement de l'externalisation et de l'intérim au détriment des CDI...

A350-fuselage-avant-toulouseIl a également critiqué l’externalisation vers le Maroc, la Tunisie ou le Mexique qui conduit à une perte de savoir-faire, une élévation du chômage en France d’autant que la moindre qualité du travail rendu «oblige souvent à des coûts additionnels imputés en France».

Alors que ce secteur va bien 150000 intérimaires ont été recrutés en 2012 soit une hausse de 30%.

En 2013 la hausse des effectifs a cependant été de 3,5% avec 20000 emplois net créés ces 3 dernières années.

Le secteur emploie 42% d’ingénieurs, 20% de techniciens et 30% d’ouvriers qualifiés.

«En 2014, on sent un léger ralentissement de cette dynamique même si on devrait rester un secteur créateur d’emplois» estime Marwan Lahoud qui se plaint de la difficulté à recruter des ouvriers qualifiés, contrairement aux ingénieurs!

De son côté, Jean-Jacques Desvignes a pointé le fait que la course à la rentabilité supposait souvent le choix de projets rentables à court terme plutôt que de projets d’avenir audacieux à long-terme tout en insistant sur le fait que l’industrie aérienne avait besoin de lancer de grands projets comme un nouvel avion régional de 90 places, le remplacement du Belouga, une nouvelle génération d’A320, le lancement d’une nouvelle plate-forme satellite télécom ou de nouveaux lanceur de satellites comme Ariane 5 ME ou 6.

14% du chiffre d'affaires en R et D

Historiquement le partenariat public-privé en Europe ou ailleurs a permis par exemple de nombreuses passerelles entre le civil et le militaire notamment comme le GPS utilisé dans le civil 20 ans après son usage dans le monde militaire ou les drones aujourd'hui, avec la perspective de futurs avions civils sans pilotes.

«Même si la France est bien placée actuellement, il ne faut surtout pas se reposer sur ses lauriers. Les défis de la compétitivité et de la concurrence sont énormes. Nos concurrents bénéficient d’aides considérables. Nos meilleurs amis de Boeing, pour leurs derniers programmes concurrents de l’A350 et de l’A380 bénéficient d’aides fiscales via des subventions de l’ordre de 8,7 milliards de dollars au mépris de toutes les règles du Commerce International» assure-t-il (NDLR: les Etats-Unis reprochent également à l'Europe des subventions déguisées).

Le duopole est fini?

«Il faut un soutien à la R&D et à la production via une démarche globale si l’on ne veut pas se faire dépasser par les nouveaux entrants qui mettent beaucoup de moyens».

Car la concurrence ne vient plus seulement des Etats-Unis mais aussi du Brésil ou de la Chine, le duopole n'étant plus de mise selon lui.

Les fabricants français et européens souffrent également de toute variation de l’euro par rapport au dollar : «nous produisons en euros mais vendons en dollars. Une variation de 10 centimes de l’euro fait 2% de marge de chiffre d’affaire» clame-t-il.

Au final l’industrie aéronautique représente 48 milliards d’euros de chiffre d’affaires, avec 80% de la production exportée, 70% des effectifs en France et 14% des revenus consacrés à la recherche et au développement avec des retombées technologiques dans de nombreux secteurs industriels

«Nous sommes l’un des seuls pays au monde à maitriser l’ensemble de la filière. La diminution de l’investissement public n’est pas sans conséquence sur l’aéronautique et l’espace qui sont des domaines d’excellence...La course contre la montre est permanente, il faut être tout le temps devant. Les cycles sont longs : 15 ans de développement 30 ans dans la vie des produits. Des erreurs dans les choix technologiques peuvent être lourds de conséquences»  avertit Marwan Lahoud.

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