Les chiffres des défaillances d’entreprises sont très mauvais pour avril 2024. Le cas Atos est révélateur du mal-être de la gestion française…
En apparence les chiffres de la banque de France pour les défaillances d’entreprises ne sont pas si mauvais pour avril 2024. On compte 59025 défaillances contre 59309 pour la période 2010-2019.
Sauf que dans le détail cette stabilité est due en grande partie pour les micro-entreprises employant très peu de personnel voire une personne seulement et qui comptent pour le gros des nombres: ces entreprises qui comptent souvent un seul salarié, les faillite sont en baisse de 2,5% pour un total de 54047. Il faut comprendre que ces activités sont souvent effectuées en parallèle d’une travail salarié en tant qu’autoentrepreneur.
Par contre pour toutes les autres entreprises, c’est l’hécatombe. Ainsi on compte 59,6% de faillites en plus pour les TPE en avril 2024 par rapport à la moyenne 2010-2019 (3146 contre 2011), 52,2% de faillites en plus pour les petites entreprises (1390 contre 913), 45,2% de défaillances en plus pour les moyennes entreprises (479 contre 330) et 75,8% e faillites en plus pour les ETI grandes entreprises.
C’est très inquiétant pour l’état de l’économie française.
Le quotidien Les Echos a même écrit un article sur la dégradation des comptes de l’AGS suite à cette forte hausse des défaillances. Selon le quotidien ses dépenses pourraient atteindre 2 milliards d’euros en 2024 avec une hausse probable des cotisations à partir de cet été.
Des faillites plus importantes en France qu'en Allemagne ou qu'en zone Euro
L'économiste Marc Touati note d'ailleurs dans une vidéo que ces faillites sont bien plus importantes en France que dans la zone Euro ou en Allemagne. Il estime que les aides durant le Covid ont aidé artificiellement certaines entreprises fragiles qui font faillite aujourd'hui. Ce qui désorganise le marché et entraine aussi d'autres entreprises plus viables. « Cela n'est pas bon pour le chômage dont le taux augmente depuis 4 trimestres consécutifs». Parallèlement selon ses données la dette publique a augmenté 3,5 fois plus vite que le PIB par habitant de 2007 à 2023 contrairement à l'Allemagne où la dette par habitant augmente quasiment au même rythme que le PIB par habitant. « C'est à cause des dirigeants français qui n'ont pas pris les bonnes mesures. Ils ont fait une fuite en avant pour continuer cette gabegie de dette publique avec de moins en moins de résultats quand on voit l'état des services publics, la pauvreté, les inégalités et maintenant les défaillances d'entreprises on se pose des questions. Nous avons un vrai problème en terme d'allocations des moyens. On n'arrive pas à faire de la France une terre de croissance forte».
Certains pointent aussi le problème du capitalisme de connivence en France. « Qu’est que le capitalisme de connivence ?Tout simplement un système de défense et de création de rentes appuyé sur la capture de l’Etat par ceux qui bénéficient ou bénéficieront de ces rentes…Et c’est ce qui s’est passe en France depuis des lustres » note l’économiste Charles Gave dans un article. Ce dernier recommande d’ailleurs pour investir d’éviter les sociétés françaises où l’Etat est actionnaire.
La faillite d'Atos est un exemple frappant du problème français (voir Atos, l'histoire d'un gâchis français). Comme l'Etat français, Atos a fait envoler sa dette en multipliant les acquisitions : rachat de la branche IT Solutions et Services de Siemens (une erreur selon certains cités dans l’article de Marianne), rachat de l’activité outsourcing de Xerox pour 1,05 milliard en 2014, rachat d'Unify pour 340 millions en 2015, rachat d'Anthelio Healthcare Solutions pour 275 millions en 2016, rachat de Syntel pour 3,4 milliards de dollars en 2018. C'est l’actuel commissaire au marché intérieur européen Thierry Breton qui a dirigé Atos pendant cette frénésie d’acquisitions de 2008 à 2019. Mais les problèmes dAtos sont aussi liés au fait que le groupe a raté le virage du Cloud et de l'outsourcing. Atos devrait être en pleine croissance alors que les offres de Cloud explosent dans le monde avec les succès de sociétés comme Google, Microsoft ou Amazon et son pôle de supercalculateurs est plus stratégique que jamais à l'heure de l'IA.
En attendant en perdant des entreprises l'économie françaises se meurt : il y a urgence à relancer l'économie en pariant sur l'innovation et l'investissement plutôt que les dépenses publiques. L'exemple de la politique française sur l'immobilier est criant : pendant qu'on oblige les propriétaires à investir des millions pour changer des fenêtres avec les DPE, aux Etats-Unis on laisse les propriétaires tranquilles et on investit des milliards dans des puces de nouvelle génération. On pense l'avenir bien différemment aux Etats-Unis ou en France...