A le veille du jour de l'an, le 31 décembre 2022 un drame a été évité de justesse à l'aéroport de Bordeaux...Le rapport du BEA pointe principalement des problèmes de gestion des ressources humaines mais aussi techniques.
Le BEA a publié un rapport édifiant sur l'incident qui aurait pu être très grave à l'aéroport de Bordeaux.
En cette veille du jour de l'an 2023, le trafic aérien a autorisé l'atterrissage de deux avions simultanément sur la piste 23 soit un Airbus A320 d'Easyjet transportant 179 passagers et un petit avion de tourisme DR400 transportant deux passagers.
Voici le déroulé des évènements : « le contrôleur a autorisé le DR400 F-GTZY à s’aligner au seuil 23, lui demandant de maintenir sa position en raison de la turbulence de sillage suite au décollage d'un avion d'Air France. Le pilote du DR400 a pris un TOP pour deux minutes. Le vol EJU 49 QH, un A320 d’easyJet Europe, était établi sur l’ILS 23, en attente d’une autorisation d’atterrissage. Le trafic VFR était alors devenu très dense. Le contrôleur, obligé d’interrompre les échanges avec les vols VFR, a autorisé tardivement l’A320 à atterrir, oubliant la présence du DR400 au seuil. Le pilote du DR400 ayant compris que l’A320 était autorisé à atterrir alors qu’il était toujours au seuil 23, s’est signalé au contrôleur, qui a immédiatement ordonné à l’A320 d’interrompre l’approche ».
Le chef de tour et la contrôleuse, surpris, ont alors pris conscience de la situation. L’équipage de l’A320, principalement concentré sur le point d’aboutissement lors de l’approche finale, n’a jamais identifié la présence d’un avion au seuil de piste.
L’approche interrompue a été exécutée de façon nominale par l’équipage easyJet. Le point le plus bas de la trajectoire s’est situé à une hauteur de 103 ft, à une distance d’environ 290 m du seuil de piste. L’A320 a survolé le DR400 à une hauteur de 178 ft, puis a poursuivi sur la trajectoire standard. » note le BEA.
Un grave accident a donc été évité de justesse et aurait pu conduire à la mort des passagers de l'Airbus ainsi que de ceux du DR 400. Comment une telle erreur a-t-elle pu se produire?
Le BEA pointe plusieurs problèmes au niveau des ressources humaines de la technologie...
En terme de ressources humaines, le tableau de présence prévoyait 6 contrôleurs. Mais le chef de l'équipe en accord avec la tour avait baissé les effectifs à seulement 3 contrôleurs durant la période où a eu lieu l'incident. Le contrôleur de secours présent en cas d'urgence n'est même pas venu travailler et la direction était au courant de ces pratiques. Le BEA indique que ces « dérives sont généralisées et anciennes et qu'il a été pointé à plusieurs reprises depuis par différents organismes ». Selon le BEA cette situation est probablement « le résultat de maintenir une relative paix sociale ». Un constat inquiétant alors que le travail des contrôleurs consiste à garantir la sécurité des vols.
Par ailleurs le contrôleur en charge de l'atterrissage n'a pas indiqué à l'équipage de l'Airbus A320 pourquoi il a différé son atterrissage or la procédure prévoit de le faire. Il ne l'a pas fait sans doute « pris par le temps » indique le BEA. « . Il est probable que si le contrôleur avait indiqué à l’équipage qu’un DR400 était au seuil de piste 23, l’équipage aurait continué sa recherche visuelle, et s’il n’était pas parvenu à identifier le DR400, aurait questionné le contrôleur sur le sujet, levant ainsi l’ambiguïté ».
Le rapport du BEA note également l'utilisation d'une technologie peu novatrice. Le contrôleur a du utiliser un écran radar où toutes les fréquences étaient regroupées (SOL, LOC, APP et SIV) ce qui a eu impact sur « l'utilisation de l'écran radar, les méthodes de travail et la surveillance croisée ».
« Le regroupement, tel qu’il a été décidé, amenait le contrôleur à gérer des espaces aériens de nature
différente sur une même échelle de l’écran radar. En effet, l’image radar sur les positions SIV et APP nécessite d’être réglée sur une grande échelle afin de pouvoir visualiser l’ensemble de l’espace du SIV et des espaces approche (TMA). Sur la position LOC, l’échelle nécessite d’être plus
« zoomée » afin de mieux visualiser les trafics proches de l’aérodrome qu’ils soient VFR ou IFR.
Ainsi, un regroupement des quatre positions comme celui mis en œuvre le matin du 31décembre 2022 ne permettait pas de visualiser tous les trafics de manière optimale » note le BEA. Un rajeunissement des méthodes employées pourrait également éviter ce genre d'erreur comme l'envoi d'instructions par ordinateur via une lien de données aux avions en plus de la communication radio ou l'utilisation de radars de surface sur les pistes permettant d'alerter les contrôleurs sur les collisions possibles.
Le rapport du BEA pointe surtout au final un mal français : la baisse de qualité des services publics constatés dans de nombreux domaines (hôpitaux, enseignement...) du fait du manque de personnel mais aussi d'un laisser-aller au niveau du management dû sans doute à la sécurité de l'emploi et à l'absence de conséquences graves en cas d'erreur.
Voir le rapport sur le site du BEA: https://bea.aero/les-enquetes/evenements-notifies/detail/incident-grave-survenu-a-lairbus-a320-oe-ine-exploite-par-easyjet-et-au-robin-dr400-f-gtzy-le-31-12-22-a-bordeaux/