L'automobile est un symbole de liberté que certains veulent tuer par idéologie. Alors que les freins à la liberté de conduire se multiplient en France nous avons interviewé le président de la principale association de défense des automobilistes : 40 millions d'automobilistes.
Business Traveler France : tout d’abord pouvez-vous présenter votre association à nos lecteurs?
Philippe Nozière, président de 40 millions d’automobilistes : nous sommes la seule association de défense des automobilistes d’intérêt général. Nous existons depuis une vingtaine d’année et comptons de nombreux adhérents.
Business Traveler France : comment expliquer le souhait qui peut sembler démagogique de la Mairie de Paris de baisser à 50km/h la vitesse sur le périphérique?
Philippe Nozière : c’est une mesure qui ne changera rien car personne ne peut rouler à 70 km/h sur le périphérique. Le Ministre des Transports s’est déclaré contre cette mesure mais la Maire de Paris a dit qu’elle l’appliquerait quand même. Il aurait été logique d’avoir une concertation avec la région avant d’imposer cette mesure démagogique. C’est une mesure qui est faite soi disant pour moins polluer. Or toutes les mesures qui ont été effectuées montrent que la vitesse idéale qui engendre le moins de pollution est entre 70 et 90km/h. Si les voitures roulent plus vite ou moins vite elles polluent plus.
Business Traveler : que penser cette réduction constante des limitations de vitesse dans les villes et particulièrement des zones à 30km/h ou des villes qui passent totalement à 30km/h au lieu de 50? Rouler à 30km/h est quasiment impossible et cela met un grand nombre de français dans l’illégalité ce qui pourrait doper l’argent des radars dans le futur. Ces mesures pénalisent surtout les actifs dont le temps est compté et criminalisent un grand nombre de citoyens, les voitures n’étant pas faites pour rouler à 30 km/h.
Philippe Nozière : nous sommes dirigés par des ayatollahs de l’environnement. C’est la dictature des minorités. Certaines minorités font un lobbying permanent. Les minorités écologiques veulent la fin des automobilistes. Dans les villes on peut se déplacer en transport en commun mais en province c’est beaucoup plus compliqué, on ne peut pas se passer de la voiture. Les politiques prennent des mesures punitives permanentes qui sont faites pour décourager les automobilistes. Pour les zones à 30km/h, les maires peuvent désormais prendre les décisions (NDLR: c’est pourquoi elles se généralisent). Ce qui est beaucoup plus inquiétant c’est qu’ils vont avoir la possibilité d’installer des radars dans les zones à 30 km/h. C’est vrai qu’il y a des zones qui peuvent être dangereuses mais il y a des moyens de faire ralentir les voitures comme le stationnement alterné (NDLR: ou les dos d'âne). On veut dégouter les automobilistes de conduire.
Business Traveler : les ZFE sont également une entrave à la liberté, au droit de circuler?
Philippe Nozière : avec les zones à faibles émissions certains automobilistes ne pourront plus entrer dans les villes. Ces zones sont une aberration totale. On prive les gens de la liberté de déplacements. On a incité des gens à acheter des véhicules Diesel par le passé et maintenant on leur dit qu’ils ne pourront plus circuler dans certaines villes en 2024-2025! De plus dans les ZFE françaises on interdit une certaine catégorie de véhicules que quel que soit leur entretien. En Allemagne on n'interdit pas les voitures qui ont un pot catalytique (NDLR: soit une grande part des véhicules diesel exclus par les ZFE françaises).
5 villes ont prévu d’imposer des ZFE en France (NDLR: Aix-Marseille, Rouen, Lyon, Paris et Strasbourg).
Business Traveler : c’est d’autant plus illogique que de nombreux français viennent travailler en ville en voiture. Alors que l’on manque d’artisans cela risque de gêner leur travail, idem pour les livraisons. On voit mal un plombier venir avec ses outils en transport en commun...
Philippe Nozière : D’autant plus que les plombiers, les artisans ont souvent des véhicules relativement anciens…
Business Traveler : la loi pour baisser la vitesse à 80KM/H très impopulaire a été adoptée puis revue et corrigée. Pour les automobilistes c’est un véritable casse-tête pour savoir quelles zones sont à 90km/h ce qui facilite les excès de vitesse et les amendes. A quand un retour au 90km/h pour toutes les routes nationales? Et quid de la multiplication des radars notamment mobiles?
Philippe Nozière : heureusement de plus en plus de départements repassent totalement à 90km/h et d’autres remettent cette limitation en place sur de nombreuses routes. Rappelons que la baisse à 80km/h ne change rien en terme d’accidentologie. Sur les radars cette mesure a bien évidemment un impact alors qu’il est difficile de savoir à quelle vitesse on doit rouler. Quant aux radars mobiles c’est une première. Des sociétés privées vont verbaliser des automobilistes.
Business Traveler : l’Union Européenne veut imposer la fin de la commercialisation des voitures thermiques en 2035. Quelle est votre opinion à ce sujet?
Philippe Nozière : je regarde dans le monde. Pour les Etats-Unis ce n’est pas leur problème. Idem pour la Chine. Il n’y a qu’en Europe qu’on veut arrêter de commercialiser les voitures thermiques en 2035. Même s’il ne faut pas mettre de côté les problèmes liés à l’environnement...
Business Traveler : les clients ne veulent pas acheter des véhicules électriques et hésitent à acheter des voitures thermiques alors que leur fin est proche d’où une panne du marché. Quid des constructeurs européens?
Philippe Nozière : le marché est au point mort. Peu de gens achètent des véhicules électriques et les constructeurs européens ne sont pas de la partie pour ce type de véhicules. Une solution pourrait être de développer des véhicules hybrides. Le danger serait que les constructeurs ne se focalisent plus que sur les véhicules électriques. Je pense qu’au final il y aura toujours des véhicules thermiques d’autant qu’il y a eu d’énormes progrès en terme de baisse de la pollution ces 30-40 dernières années. Mais je ne vois pas comment on va revenir en arrière sur l'électrique.
Business Traveler : la voiture coûte de plus en plus cher : contrôle technique, nouvelles taxes CO2 sur les cartes grises, prix bien plus élevé à l'achat des véhicules électriques... Comment vont faire les gens pour rouler d’ici 10 ans avec l’inflation des coûts due à l’électrification?
Philippe Nozière : les véhicules électriques sont plus chers à l’achat que les véhicules thermiques mais en plus il y.a de nouvelles taxes qui vont être mises en place (NDLR: à partir du 1er janvier 2023, un nouveau barème du malus sur les émissions de CO2 des véhicules de tourisme neufs sera mis en place. Cette évolution était prévue dès fin 2020 par l'article 55 de la loi de finances pour 2021 et s'appliquera à partir de 123 gCO2/km, contre un seuil de déclenchement de 128 gCO2/km en 2022. Pour ce niveau de pollution, la taxe appliquée est de 50 €. Le seuil de 1000 € sera atteint dès 146 gCO2/km (1074 €), au lieu de 151 gCO2/km en 2022. La dernière tranche du barème s'élèvera à 50 000 € pour les véhicules ayant un taux de CO2 supérieur à 225 g CO2/km (au lieu de 40 000 € en 2022 pour les plus de 223 gCO2/km).
Par ailleurs rappelons que les taxes représentent la majorité du prix du carburant. Avec les véhicules électriques il se pose le problème suivant pour l’Etat: comment va-t-il faire pour récupérer les milliards de taxes sur l’essence? Cette migration vers l’électrique va coûter très cher…
Voir : 40 millions d'automobilistes.