Turin, la capitale de l'automobile italienne a su profiter de l'épopée FIAT pour s'inventer un nouveau futur en pariant sur le tourisme et les services. La transformation réussie des usines Lingotto en un complexe multi-services, la création du supermaché du slowfood Eataly ou le tout nouveau musée de l'automobile ouvrent un nouveau modèle à cette ville méconnue. Et si Turin devenait un nouvel exemple pour l'Europé
L'histoire de Turin est intimement liée à celle de FIAT. C'est en 1899 que débute la saga de la «Fabbrica Italian Automobili Torino» avec la naissance de la 4HP cette même années, la première voiture du groupe.
La première usine du groupe ouvre peu après en 1900 puis Giovanni Agnelli devient le principal directeur de la société.
Cet homme passionné de nouvelles technologies sait s'inspirer de Ford dont il est un grand admirateur pour ériger comme modèle le fordisme dans ses usines.
Déjà, et ce que l'on sait peut-être peu en Europe, FIAT est à la pointe des dernières technologies.
Turin: les années FIAT
La construction de la première pierre des usines Lingotto est une révolution dans le monde de l'automobile.
Elle devient lors de son inauguration en 1922 la plus grande usine d'Europe et est un véritable modèle de fordisme: les châssis arrivent au rez-de-chaussée puis les voitures sont assemblées au fur et à mesure de leur montée vers les 5 étages supérieurs.
Sur le toît de l'usine, une piste permet d'essayer les voitures avant qu'elles ne soient livrées: une petite révolution.
La vie de FIAT a marqué beaucoup plus qu'on ne le croit l'histoire de Turin, de l'Italie et de l'Europe. Giovanni Agnelli avait la fibre sociale et ses salariés ont profité des meilleurs conditions de travail en Italie et peut-être même d'Europe à l'époque: des milliers de travailleurs du sud du pays (le mezzogiorno) y sont venus chercher fortune.
Le patriarche a su traverser les périodes sombres du fascisme sans s'allier à Mussolini, mais en prenant en compte l'intérêt de la FIAT.
Giovanni Agnelli meurt à la fin de la guerre en 1945: bastion de la gauche avant et pendant la guerre, la société doit s'adapter au Maccarthysme américain par la suite pour bénéficier du plan Marshall.
Vittorio Valletta assurera la transition réussie avant l'arrivée de Gianni Agnelli en 1964.
Un concept qui sera réutilisé plus tard par tous les constructeurs.
L'année 1957 marque la naissance d'un symbole avec l'arrivée de la FIAT 500: un produit culte. Sa forme tout en rondeur, son toit décapotable et sa tenue de route en font un immense succès.
Plus tard à la fin des années 60 les grèves perturbent la société: c'est le règne des années de plomb avec la naissance des Brigades rouges à Turin: elles marquent l'histoire de l'entreprise et de l'Italie avec l'enlèvement d'un dirigeant de FIAT notamment.
Puis FIAT s'empare de Lancia, de 50% des parts de Ferrari et d'Alfa Roméo en 1984.
Les années 90 sont celles de la crise qui dure jusqu'en 2003 date de décès de Gianni Agnelli.
Turin se transforme pour accueillir les touristes
L'industrie automobile n'emploie plus que 60000 personnes en 2001 contre 140000 en 1981, une véritable hémorragie.
Les jeux olympiques d'hiver de 2006 marqueront une étape cruciale pour Turin, une véritable renaissance.
Le quartier du Lingotto (en photo ci-contre), des anciennes usines FIAT est totalement rénové pour accueillir le village olympique.
Les anciennes usines de Fiat et les hangars sans âme se transforment: l'usine de Lingotto devient un lieu multi-services pour séduire les touristes et les hommes d'affaires.
Elle abrite désormais le centre commercial 8 Gallery, le centre de foire de Turin, un centre des congrès, deux hôtels (Le Méridien, NH), un musée (la pinacothèque Giovanni et Marella Agnelli), un complexe de cinéma, un restaurant gastronomique et le siège de l'université de Turin (qui n'est pas ici).
Ce grand magasin qui propose des produits d'excellence est unique en Europe avec ses 10000 mètres carrés.
Ici l'on peut déguster et acheter les meilleurs produits ou vins italiens.
Le centre abrite également 7 restaurants thématiques.
Et attention, chapeau bas: ici aucun produit n'a voyagé plus de 50 kilomètres.
Le musée de l'automobile: mémoire de l'industrie
Alors que le Lingotto est devenu un quartier branché, faisant oublier ses racines automobiles, un nouveau lieu, temple des 4 roues vient raviver les mémoires.
Le musée de l'automobile a ouvert en mars dernier à l'occasion des 150 ans de l'Italie.
Le bâtiment de l'ancien musée a été entièrement rénové par l'architecte Cino Zucchi et met en avant un hall somptueux décoré de courbes métalliques.
Mais c'est un français, François Confino, qui est le chef d'orchestre de l'exposition.
Loin d'être un lieu statique d'exposition pour les 200 automobiles exposées, le musée se révèle l'un des plus attrayants que nous ayons jamais eu l'occasion de visiter: les nombreux étudiants et lycéens présents semblaient d'ailleurs du même avis.
Les automobiles sont mises en scène pour représenter les différentes étapes et façettes de cette industrie mythique: les voyages, avec la première expédition à travers l'Asie en 1907 par une marque italienne, les années folles et les femmes qui s'intéressent pour la première fois à l'automobile, la prise en compte de l'aérodynamisme dans le design, la naissance des voitures populaire avant-guerre, les jeeps et l'arrivée du mode de vie américain en Europe, le design avec la superbe Cisitalia (en photo en intrioduction) et la DS plébiscitée par les designers, la dolce vitta italienne et la période de grande consommation des années 50/60 avec les FIAT 500/600, la liberté qu'apporte l'automobile avec le premier monospace le Multipla ou le fameux combo Volkswagen…
Le musée met en avant des films d'époque, des animations multimédia, des jeux, des décors plus vrais que nature et même de superbes maquettes miniatures comme celles sur les belles voitures américaines (le soucis du détail y est incroyable).
L'exposition se poursuit même sur un ton humoristique avec la folie des voitures où l'on peut voir des voitures-frigo, jouet, gâteaux… un délire d'architecte très sympathique qui se conclut par une mise en scène spectaculaire où une vingtaine de voiture anciennes sont alignées sur un circuit de course avec en toile de fonds un film animé: sensation de vitesse garantie!
Pour les passionnés, la visite se termine par une exposition de voitures au design inédit et un hommage aux plus grands designers qui sont souvent italiens comme Pininfarina, Gandini ou Giugiaro.
Etonnamment alors que la ville de Turin s'est fait belle et a gagné son pari du tourisme, les usines FIAT à Turin semblent elles aussi prendre le chemin d'un nouveau départ: la renaissance de la ville a-t-elle donné une nouvelle impulsion à FIAT?
Les salariés de Mirafiori, (la seconde usine emblématique de FIAT qui est toujours en activité) viennent de répondre oui en début d'année à l'accord d'entreprise.
Désormais ils ne devraient plus faire partie de la convention collective de la métallurgie: une véritable petite révolution dans ce bastion des syndicats.
Les ouvriers ont décidé de faire la croix sur certains de leurs acquis sociaux: en contrepartie de la signature de cet accord FIAT devrait fabriquer jusqu'à 250000 Alfa Roméo... et Jeep à Turin
Aujourd'hui de nombreux nouveaux modèles comme la FIAT 500 sont fabriqués en Pologne.
Une belle revanche pour FIAT, alors qu'il y a encore quelques années l'entreprise était au bord de la faillite et s'est presque faite croquer par General Motors.
Désormais, c'est FIAT qui est redevient ambitieuse: la jolie italienne a décidé de partir à l'assaut de l'Amérique en prenant d'ici la fin de l'année 35% de Chrysler (le groupe en détient 25% aujourd'hui).
Alors que pour nombre français, Turin n'était qu'une banlieue que l'on apercevait au loin depuis l'autoroute, la ville séduit désormais les touristes et s'apprête peut-être à redevenir un modèle industriel pour l'Europe.
Pour FIAT, l'avenir reste encore à construire à Turin: après des mythes comme la FIAT 500, la Ferrari ou l'Alfa Roméo, qui sait ce que les ingeniere de la Fabbrica vont encore inventer?
La nouvelle voiture électrique incontournable, le scooter design, comme réponse aux embouteillages?
Alors que l'Italie vient de fêter ses 150 ans, on espère que nos cousins italiens sauront encore nous faire vibrer en ce XXIème siècle: après le rêve américain, le rêve italien est peut-être à portée de main…
INFOS PRATIQUES:
Y aller:
- route: 7H30 environ par autoroute depuis Paris A6/A40/E25.
- train: 6H29 en TGV.
- aérien: Ryanair vient de lancer un vol direct au départ de Paris-Beauvais vers Turin. Les vols partent les lundis, mercredis vendredis et dimanches à 17H20, arrivée 18H40. Les vols décollent de Turin à 19H05 pour arriver à 20H25 à Beauvais. Tarif aller simple à partir de 29,99 euros TTC. Compter 10 euros en sus pour le trajet de bus aller (20 euros A/R).
Alitalia propose également des vols directs vers Turin au départ de Paris.
A Voir dans le quartier de Lingotto:
- Eataly: le temple du slowfood italien dans le quartier de Lingotto . site web: www.eataly.it.
- Musée de l'automobile: magistral. Voir: www.museoauto.it.
- Site web de FIAT: www.fiat.fr.
- Date clés de l'histoire de FIAT: fiat.dessources.com/fr/historique.
- Pinacothèque Giovanei e Marella Agnelli: collection léguée par la famille à la ville de Turin. Sculptures de Canova, vues de Canaletto, peintures impressionistes...Voir: https://www.pinacoteca-agnelli.it
- l'ancienne usine du Lingotto.
- parc del valentino: un parc de 55 Ha, l'un des plus grands d'Europe dessiné par Pierre Barillet-Deschamps avec pistes cyclables, chemins, fontaines...
